Affaire de "la chemise arrachée" d’Air France : ambiance électrique au procès

Le procès dit de la "chemise arrachée" s'est ouvert ce mardi à Bobigny.
Le procès dit de la "chemise arrachée" s'est ouvert ce mardi à Bobigny.
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Rédaction d'Europe1.fr , modifié à
Quinze salariés d’Air France sont jugés depuis ce mardi dans la fameuse affaire de la "chemise arrachée". 

Applaudissements, protestations, prises de becs entre avocats : le procès de 15 salariés d'Air France, jugés pour la fameuse "chemise arrachée" du DRH, s'est ouvert ce mardi dans une ambiance électrique au tribunal de Bobigny. Et même le trait d’humour du président -  "vous pouvez mettre votre téléphone en mode avion" - en préambule de ces deux jours d’audience n’est pas parvenu à détendre l’atmosphère. Cinq prévenus sont poursuivis pour "violences en réunion" et dix pour "dégradations".

Les faits se sont produits le 5 octobre, en marge d'une manifestation contre un projet de restructuration d'Air France visant à supprimer 2.900 emplois pour redresser sa compétitivité. Après avoir forcé le portail d'accès au siège de la compagnie aérienne à Roissy, une centaine de manifestants ont envahi la salle où la direction était en train de présenter le plan en comité central d'entreprise. Le directeur des ressources humaines Xavier Broseta et celui de l'activité long courrier, Pierre Plissonnier, avaient été malmenés lors d'un mouvement de foule, de même que certains des vigiles assurant leur protection.

Les vidéos au cœur de l’enquête. Les images des deux cadres fuyant sous les huées, torse nu et chemises en lambeaux, ont fait le tour du monde. "Je tiens à dire l’humiliation que peuvent représenter ces images", a confié à la barre Pierre Plissonnier, aujourd’hui en congé reconversion professionnelle. "Elles ont été vues 1,7 milliard de fois, comme les JO." Une large partie de la journée a été consacrée au visionnage de ces vidéos, aux images parfois floues et à contre-jour. L’essentiel de l’enquête repose en effet sur des reportages des différentes chaines d’information et sur les images des caméras de videosurveillance… Car, dans cette cohue, les deux cadres d’Air France n’ont pas reconnu les auteurs des agressions, c'est le visionnage des bandes qui a permis d’identifier les prévenus. "Je fais conscience aux enquêteurs, il y a sans doute des preuves", poursuit Pierre Plissonnier.

Pourtant, le président en convient, "personne ne tombera d’accord sur quoi que ce soit". Ce qui est perçu par les uns comme une agression est vécu par les autres comme les conséquences d’un mouvement de foule au cours duquel tout le monde tombe sur tout le monde. Certains prévenus assurent même avoir tenté de venir en aide aux dirigeants d’Air France, notamment lors de la fameuse scène de l’arrachage de chemise du DRH, Xavier Broseta. "Il vous est reproché de lui avoir saisi le bras pour l’empêcher d’avancer", lance le président à Samir A., l’un des prévenus. "Pas pour l'empêcher d'avancer, pour l'aider !" Sur toutes les images, assure-t-il, il était devant Xavier Broseta pour "aider à son extraction". Ce dernier le reconnait d’ailleurs, "dans la confusion de l’action, j’ai perçu que des manifestants essayaient de m’aider", sans pour autant se souvenir spécifiquement de Samir A.

"On n’est pas au spectacle". La confusion est entretenue par la décision du magistrat de ne pas visionner une seconde fois les vidéos : les interrogatoires sont donc basés sur des captures d’écran peu lisibles. Difficile sur des images fixes de comprendre le déroulé d’une action. Les esprits s’échauffent. "Baveux", lance un salarié alors qu'un avocat d'Air France cuisine l'un de ses collègues à la barre. "Pas de manifestations, de protestations, sinon j'évacue la salle: on n'est pas au spectacle, ici!", avertit le président de la 14e chambre. Les rappels à l'ordre se multiplient, y compris à l'égard des avocats: "vous n'allez pas vous chamailler, vous aussi!", soupire le président. Le procès reprendra mercredi avec les plaidoiries des parties civiles.