Des "artisans de la mort" ayant "pleine autorité" : la peine maximale a été requise en appel mercredi à Paris contre deux anciens bourgmestres rwandais, déjà condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité en 2016 pour avoir participé au génocide des Tutsi dans leur village en avril 1994.
Des rouages essentiels. Les avocats généraux ont désigné Octavien Ngenzi, 60 ans, et Tito Barahira, 67 ans, comme des rouages essentiels du génocide dans leur commune de Kabarondo, dans l'est du Rwanda. Une période de sûreté des deux tiers a été demandée pour Ngenzi, bourgmestre en exercice en 1994 et à ce titre "responsable de tous les morts de la commune". Les deux hommes, qui se sont succédé à la tête de la commune de 1976 à 94, ont nié jusqu'au bout toute participation au génocide.
"Diriger" les tueurs. Assis droits dans le box, ils ont écouté, presque impassibles, le lourd réquisitoire. Frédéric Bernardo et Aurélie Belliot ont décrit deux hommes ayant "accumulé des privilèges et du patrimoine" et qui sont "allés jusqu'au bout de la logique génocidaire" pour conserver des avantages politiques. Un Ngenzi qui a gardé sa "pleine autorité" et fini par "diriger" les tueurs, un Barahira toujours "craint", qui "harangue les tueurs" auxquels il se mêle volontiers.
"Est-ce que les interventions d'Octavien Ngenzi ont pour effet d'arrêter les massacres ? Non. De déclencher les tueries ? Oui. Conserve-t-il son autorité de bourgmestre ? Oui. Parvient-il à se faire respecter des (miliciens extrémistes hutu) Interahamwe ? Complètement", a asséné Aurélie Belliot, reprenant un à un les épisodes marquants de ce début d'avril dans la commune rurale.
Huit semaines de débats. Plus de huit semaines de débats ont donné à voir un génocide entre voisins, sur les collines où les habitants participaient autrefois ensemble aux travaux communautaires. A Kabarondo, le massacre le plus effroyable eut lieu à l'église, le 13 avril, dans cette commune où des milliers de paysans tutsi s'étaient réfugiés, espérant gagner un sanctuaire, comme l'avaient été les lieux de culte lors des pogroms précédents depuis les années 1960.