Airbnb en France, c'est dix millions de voyageurs qui utilisent le service chaque année, plus de 400.000 annonces de logements, dont 60.000 rien qu'à Paris… et seulement 92.944 euros d'impôts payés à Bercy. Selon Le Parisien, qui révèle ce montant lundi, la plateforme d'hébergement use d'une stratégie d'optimisation fiscale lui permettant d'échapper presque complètement aux impôts français.
Peu de salariés, pas de machines. Comment expliquer cette situation ? En Europe, le siège d'Airbnb est situé en Irlande - où l'impôt sur les sociétés est l'un des plus bas du continent, à 12,5%. Et à Paris, la plateforme exerce uniquement des activités de marketing : toutes les factures des réservations françaises passent par les filiales anglaise et irlandaise du groupe. "En France, on impose en fonction d'un 'établissement stable', c'est à dire la présence d'hommes et de machines sur le territoire", explique Eric Woerth, président de la commission des Finances à l'Assemblée nationale, interrogé par Le Parisien. "Le problème de l'économie, numérique, c'est que ces sociétés n'ont ni effectifs conséquents de salariés, ni machines en France."
Pas plus qu'une PME française. Résultat : le géant de la location ne paie pas plus d'impôts qu'une PME française. Et c'est tout à fait légal. "Les hôtes (ndlr : les loueurs) Airbnb conservent jusqu'à 97% du prix qu'ils facturent pour louer leur logement et la grande majorité des revenus générés par la plateforme Airbnb revient aux hôtes et est assujettie à la taxe locale", se défend un porte-parole du groupe, sollicité par le quotidien.
Autrement dit : si Bercy ne touche pas d'impôts via Airbnb, il en perçoit via les propriétaires. "Nous avons développé un certain nombre d'initiatives pour informer les hôtes sur les taxes dont ils doivent s'acquitter", explique d'ailleurs la plateforme. "Par ailleurs, nous collectons et reversons la taxe de séjour pour le compte des hôtes dans plus de 50 villes françaises."
"Une taxation du chiffre d'affaires" ? Insuffisant pour Eric Woerth, pour qui "le droit fiscal n'est pas adapté aux spécificités de l'économie numérique". "Il faut faire évoluer la législation, notamment au plan européen" et "changer les règles de fiscalisation des profits de ces secteurs d'activité", estime le député, qui rappelle la promesse d'Emmanuel Macron de lutter contre ce phénomène d'optimisation fiscale. Et avance : "La meilleure idée est une taxation du chiffre d'affaires".