Les pierres sont balancées derrière la haie par un jeune homme, "pour que les gens des bourgs alentours puissent venir voir qu'on est super gentils". Patiemment, le zadiste déblaye la "route des chicanes" du tas de cailloux qui la barrait. Depuis sa fermeture en 2013, c'est la première fois que la D281 menant à la Zad de Notre-Dame-des-Landes va être libérée des obstacles qui la jonchait, cinq jours après la décision de l'exécutif de ne pas construire d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes.
"Rien ne va changer". Depuis une baraque colorée bricolée sur un carré de bitume, un militant plus âgé le regarde faire, dépité. "Nous voyons disparaître des symboles de la lutte, sans qu'il n'y ait véritablement d'opposition. Les jeunes générations aident à débarrasser la route et c'est très dommage qu'ils n'aient pas conscience de perdre les quelques miettes dont ils se suffisaient. Tout le monde crie victoire, mais la pression retombe totalement et rien ne va changer", déplore-t-il après cinq ans de vie sur la Zad.
Rendez-vous des opposants lundi à 10 heures. À l'intérieur de la cabane secouée par le vent, autour d'un poêle fumant, des anciens élaborent un plan : faut-il dévier la route de quelques mètres pour sauver au moins cet abri symbolique, l'un des rares construit à même le bitume ? L'Acipa, association d'opposants institutionnels, a en tout cas invité ses adhérents et sympathisants "à venir lundi 22 janvier, dès 10h au 'Lama Faché' autour d'un café, pour reboucher les trous et enlever les chicanes". Pour l'association, "cette route était et restera un symbole de notre résistance commune, et c'est tous ensemble que nous mettons en oeuvre son usage partagé, puisqu'il n'y aura pas d'aéroport".
La décision de la rendre aux automobilistes a fait débat au sein des zadistes, les militants les plus radicaux voulant la maintenir sous leur contrôle. Mais alors que le Premier ministre Édouard Philippe a menacé les opposants d'une intervention militaire s'ils ne rendaient pas la route, la chaussée devrait bientôt être rouverte.