Stéphanie est installée depuis dix ans dans la Manche où elle se consacre à son élevage de moutons de prés-salés, après une première vie passée à Paris. Au micro d'Olivier Delacroix sur Europe 1, cette graphiste de formation raconte comment, à 28 ans, un coup de cœur inattendu pour la côte normande et le monde agricole l’a poussé à tenter cette improbable reconversion.
"Je venais à contrecœur passer un séjour en Normandie. J’étais une citadine qui se pensait très épanouie à Paris, et je n’aimais pas la campagne, donc je n’étais pas ravie de venir patauger dans la boue en plein hiver, au fin fond de la Normandie. [...] Mais la découverte de ce littoral et de ce terroir m’a assez séduite. Surtout, j’ai découvert l’élevage de moutons de prés-salés, puisque le gîte dans lequel j’étais est en bordure de prés-salés. Et comme je n'avais aucun a priori sur l'agriculture, ni positif ni négatif, j’ai été assez envoûtée par le mode d’élevage des moutons qui avait l’air complètement sauvage et naturel.
"Je ne pouvais plus prendre le métro sans pleurer"
Je suis revenu en vacances ici plusieurs fois. Chaque fois que j’y venais, je me sentais bien et en harmonie. Chaque fois que je repartais à Paris, je me sentais de plus en plus enfermée dans un univers cloisonné, pas du tout épanouissant. Je devenais neurasthénique, je ne pouvais plus prendre le métro sans pleurer.
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De retour au lycée… à 28 ans
Je n’envisageais plus de survivre à Paris sans me jeter sous le métro un matin ou un autre. L’idée de devenir agricultrice s’est imposée de manière évidente, mais aussi parce que je l’ai construite. Je n’ai pas sauté le pas du jour au lendemain […]. Je me suis dit, pour changer de vie, il faut faire un business plan. Est-ce que je dois rependre des études ? Me faire aider par un congé de formation ? J’ai construit ce projet de manière rationnelle.
On est de plus en plus nombreux à changer de vie ou de carrière. Il y a dans les lycées agricoles un département dédié aux adultes en reconversion. Ce ne sont pas des cours très élaborés, je n’ai pas fait le test d’agronomie.
Une famille à l'écoute
Ma famille l’a plutôt bien pris. […] Chacun avait eu l’occasion de se remettre au moins une fois en cause et de hiérarchiser différemment ses priorités. Quand ils ont vu que ce qui pouvait me rendre heureuse c’était de partir à la campagne et de devenir agricultrice, ils ont trouvé que c’était plutôt mieux que je le fasse à 28 ans, au lieu d’attendre d’avoir 50 ans, d’être malheureuse et de quitter mari et enfants sur un coup de tête.
"Je n’avais pas tout pigé à ce qui m’attendait"
À aucun moment, je n’ai regretté. En revanche, mes objectifs ont évolué au fil des ans. Plus j’ai découvert de choses sur ce nouveau métier, plus je me suis rendu compte que ça ne correspondait pas à l’idée que je m’en étais faite au début. Mon objectif a évolué, et j'ai fait évoluer mon exploitation en fonction de ça. […] Ma grande chance, c’est que j’étais inconsciente et que je n’avais pas tout pigé à ce qui m’attendait."