"N'oubliez jamais qu'il suffira d'une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question." La célèbre déclaration de Simone de Beauvoir pourrait se vérifier avec la crise sanitaire du Covid-19. Dans les entreprises, les questions d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ont été complétement reléguées au second plan. Le premier confinement, en mars dernier, a bouleversé le monde professionnel : personne n'était prêt. Dans les services "Ressources Humaines", tous les projets hors-Covid ont été stoppés net.
Et si beaucoup d'entreprises affirment avoir désormais repris leurs missions, "on a bien six mois dans la vue", selon une chargée RH d'un grand groupe bancaire. A cela s'ajoutent les recrutements gelés ou encore les formations et audits annulés.
La peur d'une "fausse excuse"
Margaux Terrou dirige le cabinet de conseil Heroes, spécialisé en égalité professionnelle. Depuis le début de la crise, deux tiers de ses projets ont été reportés ou abandonnés par les entreprises avec lesquelles elle travaille.
>> LIRE AUSSI - Les femmes ont été sous-représentées dans les médias pendant la crise du coronavirus
"J'ai un DRH qui m'a littéralement dit : 'écoutez Margaux, en ce moment ce n'est juste pas possible. Dans les entreprises, c'est marche ou crève. L'égalité professionnelle, ce n'est plus la priorité. La priorité est de sauver des emplois et d'éviter un maximum de casse'", raconte-t-elle. "C'est un argument que je comprends, mais à court terme. Et là, j'ai peur que ce soit un peu aussi une fausse excuse pour les mauvais élèves pour se dédouaner en disant 'non mais attendez, il y a la crise sanitaire'."
Vers des coupes budgétaires ?
Une inquiétude partagée par l'Association nationale des DRH. Selon son vice-président, certaines entreprises pourraient même tenter de couper dans les budgets "égalité salariale", destinés à faire du rattrapage pour les femmes moins payées.
Pour un bilan complet des effets de cette crise sur l'égalité professionnelle, il faudra attendre le prochain index publié par le ministère du travail au printemps. L'exécutif n'exclut pas de resserrer la vis en cas de mauvais résultats.