Voilà une décision du Conseil des prud'hommes de Paris qui risque de faire du bruit. En janvier 2016, il a décidé que traiter un coiffeur de "PD" n'était nullement une insulte homophobe - seulement des propos injurieux - donnant ainsi tort au plaignant, un employé licencié d'un salon de coiffure, rapporte vendredi France Info.
"C'est un sale PD". Début 2015, ce coiffeur a reçu un SMS par erreur de la part de sa manager : "je ne le sens pas, je ne le garde pas, c'est un sale PD, ils ne font que des tours de pute". Le lendemain, la manager en question apprend à l'employé que sa période d'essai est rompue pour "insuffisance professionnelle". Il saisit aussitôt le défenseur des droits.
Période d'essai rompue. Le salon de coiffure s'est défendu lors du jugement d'avoir renvoyé le coiffeur parce qu'il était homosexuel. Une version qu'a acceptée le Conseil des prud'hommes de Paris. Le salon a en effet été condamné à 5.000 euros de dommages et intérêts pour licenciement abusif.
T'es coiffeur, te faire traiter de "PD" c'est OK parce que, les coiffeurs sont souvent gays hein. Merci le tribunal. pic.twitter.com/orUcZDr522
— Mathieu Brancourt (@MBrancourt) 7 avril 2016
Une décision prise "dans la précipitation". La discrimination homophobe n'a, elle, pas été retenue. "Dans le contexte du milieu de la coiffure", explique le jugement, ce terme "ne peut être retenu comme propos homophobe, car il est reconnu que les salons de coiffure emploient régulièrement des personnes homosexuelles notamment dans les salons de coiffure féminins, sans que cela ne pose de problèmes". Selon le chef du pôle emploi privé au Défenseur des droits, Slimane Laoufi, le Conseil de prud'hommes a "ni plus ni moins repris les conclusions de l'avocat du salon de coiffure", se demandant aussi si la décision n'a pas été prise "dans la précipitation".
Une décision "illogique". La ministre du Travail Myriam El Khomri a estimé vendredi "scandaleux" et "choquant" cet arrêt des Prud'hommes, tout en précisant ne pas connaître cet arrêt. "J'imagine que cette personne va faire appel" de cette décision, a-t-elle ajouté. Slimane Laoufi accompagnera l'ex-employé en appel. Sur Europe 1 vendredi midi, il a jugé que la décision relevait du "préjugé" et dénoncé son "illogisme". "On est sur un stéréotype qui dit que dans le secteur de la coiffure il y a plein d'homosexuels et donc il ne peut pas y avoir d'insulte homophobe", a estimé le représentant du Défenseur des Droits. "Ce seul préjugé dédouane de la discrimination. C'est là l'illogisme de la décision : d'un côté on dit ce n'est pas homophobe, mais on condamne quand même l'employeur parce qu'il y a injure."