L'Assemblée nationale a adopté lundi, sans changement, la proposition de loi Grandguillaume visant à "pacifier" les relations dans le transport public de la personne, en plein conflit sur les rémunérations des chauffeurs VTC pratiquées principalement par Uber. Pour être adopté définitivement par le Parlement, ce texte qui entend apaiser les tensions notamment entre taxis et VTC (voitures de transport avec chauffeur) devra faire l'objet d'un ultime vote de la chambre haute, programmé mercredi. En cas de rejet, il reviendra devant l'Assemblée, qui aura le dernier mot.
Une réponse aux mouvements sociaux. A l'Assemblée, la droite s'est abstenue, Lionel Tardy (LR) dénonçant un texte "qui ne sera qu'une rustine de plus" et l'UDI Bertrand Pancher un projet "peu ambitieux" malgré "quelques mesures utiles". Socialistes et radicaux de gauche ont en revanche voté pour, les députés du Front de gauche aussi, "malgré ses insuffisances". Dans le sillage de la loi Thévenoud de 2014, cette proposition de loi portée par le député Laurent Grandguillaume (PS) a été conçue comme une réponse aux mouvements sociaux déclenchés début 2016 par l'ensemble des conducteurs, taxis, VTC et Loti (transport collectif à la demande), professions différentes qui se disputent des clients identiques.
"Protéger les chauffeurs". Jugeant que le texte arrivait "à point nommé", l'élu de Côte d'Or a affirmé aux députés qu'il ne s'agissait pas "d'opposer les chauffeurs entre eux mais de les protéger". Il a rappelé avoir dénoncé la "paupérisation" des chauffeurs de tous statuts, imposée par "le dumping social" d'Uber, face aux "chantres béats de l'ubérisation heureuse". Des "limites de l'ubérisation" également pointées par le député non inscrit Thomas Thévenoud dans un communiqué.
Crise entre Uber et ses chauffeurs. "Le paradoxe est qu'au moment même où nous allons franchir une étape importante sur le chemin de la régulation de ce secteur et de la coexistence entre taxis et VTC survient une autre crise, d'une autre nature, qui concerne les relations entre les conducteurs de VTC et les plateformes", a souligné le secrétaire d'État aux Relations avec le Parlement, André Vallini. Depuis jeudi, les chauffeurs sont mobilisés pour réclamer une amélioration de leur rémunération et de leurs conditions sociales, notamment auprès de la plateforme américaine Uber. Des discussions cruciales entre plateformes et chauffeurs, entamées lundi matin, devaient reprendre dans la soirée au secrétariat d'État aux Transports.
"Renouer le dialogue". Mais André Vallini a estimé que la réunion dans la matinée au ministère ne pouvait "être conclusive". L'objectif, a-t-il dit, était de "renouer le dialogue" et de prévoir "un calendrier de négociations" sur des questions sociales "qui ne peuvent rester sans réponse", car le modèle Uber ne doit "pas ressembler à l'ancien monde des journaliers du XIXe siècle". Le texte de Laurent Grandguillaume précise les obligations des plateformes et sanctions encourues en cas d'infraction, et leur interdit d'imposer des clauses d'exclusivité aux chauffeurs. Il doit aussi permettre une meilleure visibilité du secteur via un recueil de données auprès de ses acteurs.
Il prévoit également la mise en place d'un tronc commun d'examen dans les chambres des métiers pour les taxis et VTC, ce qui permettra d'éviter des fraudes constatées, selon Lionel Grandguillaume. Concernant le statut de Loti, le texte entend revenir "à l'esprit de la loi", "détournée" par certaines plateformes, en le réservant réellement au transport collectif, selon le député. Côté taxis, la proposition prévoit que, pour toutes les courses, le passager puisse payer par carte bancaire s'il y a un terminal de paiement.