1.100 vols annulés en mai, 1.100 également en juin et 1.000 en juillet : cette année, l'été n'est pas synonyme de retour du soleil pour Ryanair. Rien que sur le premier mois des vacances, le nombre de vols annulés a été multiplié par 44 comparé à l'an passé. Des annulations engendrées par les "grèves inutiles" des pilotes et des personnels de cabine, selon les mots de la compagnie. Mais avec ces grèves à répétition, les augmentations de salaire auxquelles la compagnie a dû consentir, l'arrivée des syndicats et la hausse du prix du pétrole, c'est tout le modèle économique de Ryanair qui est menacé. Son bénéfice net est en forte baisse, tout comme son action. Une médiation a été demandée par la direction vendredi.
Grèves à répétition
La direction avait bon espoir de calmer les esprits quand, le 30 janvier dernier, elle a reconnu pour la première fois un syndicat de pilotes, ce qu'elle avait rechigné à faire depuis sa création en 1994. D'autant que Michael O'Leary, le fondateur et PDG de la compagnie irlandaise, avait également consentie à une augmentation de 20% de tous ses pilotes. Depuis l'annulation de 20.000 vols par la compagnie aérienne en septembre dernier en raison du manque de pilotes, le climat s'était fortement tendu avec la direction. Problème, ces décisions ont eu l'effet inverse. Enfin reconnus après des années d'absence, les syndicats se sont sentis pousser des ailes. En surfant sur le ras-le-bol des salariés, ils ont réussi à instaurer un rapport de force.
Les grèves se sont multipliées dans plusieurs pays et notamment en Irlande, au siège de la compagnie. Les 25 et 26 juillet derniers ce sont les personnels navigants cabine espagnols, portugais et belges qui ont forcé la compagnie à annuler 600 vols, laissant plus de 100.000 passagers sur le carreau. Et Ryanair doit déjà faire face à un nouvel appel à la grève pour le 10 août. Et cette fois-ci, les syndicats, plutôt que d'agir pays par pays, appellent à une grève dans tous les pays européens où la compagnie est présente. Cette dernière pourrait de nouveau entraîner l'annulation de plusieurs centaines de vols. Or ces grèves coûtent cher à Ryanair. Comme tous les transporteurs européens, la compagnie est tenue de ré-acheminer les passagers qui devaient voler avec elle le plus rapidement possible ou de rembourser le billet acheté. Résultat, lors du dernier trimestre (mars - juin), le bénéfice net de l’entreprise a baissé de 22%.
Des contrats dans leurs pays d'origine
Malgré la médiation demandée par la compagnie vendredi, le conflit ne semble pas prêt de se débloquer. La direction juge les demandes du personnel « pas raisonnables » et a dénoncé dans un courrier rendu public l’implication de représentants syndicaux d’autres compagnies dans les grèves en cours. De leur côté, les syndicats continuent de demander à Ryanair d’accepter la présence de représentants syndicaux qui ne seraient pas salariés de la compagnie lors des négociations, mais surtout de permettre aux salariés de disposer de contrats dans les pays où ils opèrent. Actuellement, tous sont employés sous des contrats de droit irlandais, nettement plus avantageux pour Ryanair car soumis à moins de taxes et d'obligations. Pour mettre fin au mouvement, la compagnie menace même de supprimer des vols pour la période hivernale. Un moyen de sauver la face financièrement et de limiter la baisse de son bénéfice. Une menace qu'elle a déjà partiellement mise à exécution en Irlande où une réduction de 20% de sa flotte a été annoncée le 25 juillet. 300 emplois sont menacés.
Dans le low-cost, cette situation contraste avec les bons résultats du numéro deux du secteur, easyJet, qui nourrit de grandes ambitions pour cette année. Il vient de franchir le cap des 1.000 lignes en Europe, multiplie les nouvelles destinations, notamment en France, et a inauguré une nouvelle base à Bordeaux en mars dernier, la sixième en France et la trentième en Europe. Trois avions y sont basés. Le modèle d'easyJet, plus souple, et pensé pour l'utilisation des grands aéroports (à l'inverse de Ryanair qui opère depuis des aéroports secondaires plus éloignés des villes) lui permet de proposer des tarifs un peu plus élevés. La compagnie anglaise bénéficie également de la jeunesse de sa flotte, peu consommatrice en carburant, qui lui permet de mieux supporter la hausse du prix des carburants. Le ciel n'est donc pas sombre pour tout le monde.