Vers une pénurie mondiale des pilotes de ligne ? "Ils sont tous, aujourd'hui, largement en heures supplémentaires"

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Romain David , modifié à
Les capacités de formation de nouveaux pilotes de ligne sont incapables, actuellement, de soutenir le rythme de croissance du trafic aérien mondial.
INTERVIEW

Il manque des pilotes dans l'aviation civile. Ce constat inquiète les compagnies aériennes, sous la menace d'une véritable pénurie dans les années à venir. Ainsi, entre un marché aérien européen qui affiche une croissance annuelle de 3%, et un marché asiatique qui grandit chaque année de 8 à 10%, Boeing et Airbus ont calculé que quelque 650.000 nouveaux pilotes seront nécessaires dans les vingt prochaines années aux compagnies aérienne à travers le monde pour pouvoir soutenir l'augmentation du trafic. "C'est à peu après le double des capacités des écoles de pilotes", relève mercredi au micro d'Europe Matin Geoffroy Bouvet, président de l'Association des professionnels navigants de l’aviation.

Travailler plus. Et déjà, les premières conséquences se font sentir sur des personnels naviguant obligés de multiplier les heures pour suivre la cadence. "Tous les pilotes sont, aujourd'hui, largement en heures supplémentaires", indique ce commandant de bord. "Ryanair a dû annuler 2.000 vols par mois depuis qu'on leur impose d'appliquer les règles sur les temps de travail des pilotes", pointe-t-il.

Manque d'écoles. Pour Geoffroy Bouvet, la crise économique de la fin des années 2000 explique cette insuffisance des capacités de formation, du moins pour les pays occidentaux. En effet, frappées par des difficultés financières, les compagnies aériennes ont alors cessé d'investir pour le développement de leurs écoles de pilotage, quand elles ne les ont tout simplement pas fermées. "En France, on peut estimer le besoin à 300 pilotes par an, et les capacités de formation sont à la moitié".

 

Des temps de formation relativement longs. Certaines compagnies occidentales, plutôt que d'attendre l'arrivée sur le marché de nouveaux diplômés, peuvent débaucher des pilotes travaillant déjà pour des compagnies asiatiques. Mais le changement d'appareil oblige aussi à un temps de formation plus ou moins long. "Il faut les former pour entrer dans la compagnie. Ça n'est pas parce que vous êtes pilote en Asie que vous n'avez pas un stage de formation", explique Geoffroy Bouvet. "Tous les programmes de formations, qui sont longs […], sont saturés. Air France fait 1.000 qualifications par an".

"Ce que l'on veut, c'est des gens qui sont capables de s'adapter, de travailler en équipage et d'apprendre très vite. Toute leur vie, il va falloir qu'ils apprennent", conclut le pilote.