Prendre le métro, le bus ou le tramway à Paris, sans avoir à dépenser 1,90 euro pour s'offrir un ticket ? La perspective peut être alléchante pour les Franciliens. Mardi, la maire Anne Hidalgo s'est rendue à Dunkerque, dans le Nord, pour glaner de bonnes idées.
L'exemple dunkerquois
En effet, depuis le 1er septembre, l'agglomération de Dunkerque, qui compte environ 200.000 habitants, a mis en place le bus 100% gratuit sur l'ensemble du réseau de la communauté urbaine, devenant ainsi la plus importante agglomération européenne dont le transport public n'est pas payant. Tallinn, en Estonie, réserve la gratuité à ses seuls résidents. Patrice Vergriete, le maire divers gauche de Dunkerque, partage avec Anne Hidalgo la volonté de réduire la place de la voiture sur son territoire. Dans l'agglomération nordiste, les transports publics ne représentent que 4,7 % des déplacements, contre 66 % pour la voiture.
Une "piste empruntable" pour Paris ?
À Paris, une équipe municipale planche sur la faisabilité de la gratuité des transports depuis le mois de mars. C'est donc dans le prolongement de cette étude qu'Anne Hidalgo a fait le déplacement jusqu'à Dunkerque pour nourrir sa réflexion. "Je ne cherche pas à convaincre, je cherche d'abord à comprendre si la piste de la gratuité est une piste empruntable pour une ville comme Paris", a-t-elle expliqué au micro d'Europe 1 mardi. "Je souhaite que le débat public soit éclairé, qu'on sorte des poncifs, que les Parisiens aient le même niveau d'informations que moi sur les avantages et les inconvénients. Mon intuition, c'est qu'il y a des pistes de gratuité", juge la maire de la capitale.
"La vie est dure, la vie est très chère dans une ville comme Paris. J'essaie de soutenir les familles. La mesure de gratuité s'inscrit dans un projet, pour des habitants, dans leur diversité. À Paris comme à Dunkerque, il y a des personnes qui font des sacrifices énormes, et ça, je dois en tenir compte", plaide Anne Hidalgo.
En France, une trentaine de territoires au total - Compiègne, Chantilly, Aubagne, ou encore Niort - ont choisi d'opter pour la gratuité de leurs transports en commun. En Ile-de-France, plus d'un million de personnes bénéficient déjà de la gratuité ou de tarifs réduits, notamment les personnes handicapées et les personnes de plus de 65 ans.
Déjà une levée de boucliers
La question autour de la gratuité des transports en commun parisiens suscite l'opposition ferme de plusieurs élus, à commencer par Valérie Pécresse, la présidente de la région Ile-de-France. Début octobre, Ile-de-France Mobilités lui a remis les conclusions d'une étude de faisabilité sur cette mesure. Et le résultat est sans appel. La gratuité aurait un "effet minime sur la baisse du trafic routier et l'amélioration de la qualité de l'air", elle "dégraderait rapidement l'ensemble des lignes de transports en commun", et elle "occasionnerait 500 euros d'augmentation des impôts par ménage l'année prochaine en Ile-de-France", peut-on lire dans ce rapport.
La présidente LR de la région considère aussi que la gratuité des transports ne serait pas adaptée à Paris, dès lors que la ville compte déjà "huit lignes de métro saturées." "Si vous faites de la gratuité, vous augmentez la saturation", avait-elle expliqué fin septembre. Pour Valérie Pécresse, la seule manière d'inciter les Franciliens à laisser leur voiture au garage pour emprunter les transports en commun seraient de les rendre plus confortables, moins vétustes.
Mais selon les élus d'opposition, si Anne Hidalgo met cette séduisante idée sur le tapis, c'est purement et simplement à des fins électorales. "Que la campagne des municipales 2020 commence !", avait ironisé le groupe PPCI (pro-Macron, ex-LR) du Conseil de Paris, en mars dernier, quand la gratuité pour les seniors a été votée.