Le gouvernement a présenté mercredi en Conseil des ministres son projet de loi anti-fraude, qui prévoit d'accroître le recours au renseignement et de renforcer l'arsenal judiciaire hexagonal afin de lutter plus efficacement contre l'évasion fiscale. Le texte de loi, présenté comme la contrepartie de la loi sur le droit à l'erreur et des baisses d'impôt adoptées à l'automne, vise à "doter l'administration de nouveaux outils" pour "mieux traquer la fraude", explique Bercy. "Nous souhaitons bien distinguer les gens de bonne foi des fraudeurs", précise l'entourage du ministre des Comptes publics Gérald Darmanin, qui porte le texte. "L'objectif, c'est d'être plus efficace dans la lutte contre la fraude", ajoute-t-on. Le projet de loi, qui sera débattu au parlement avant l'été en vue d'une adoption définitive à l'automne, prévoit ainsi la mise en place de sanctions administratives pour les "officines" accusées de favoriser l'évasion.
260 affaires en attente d'un traitement judiciaire. Il comprend également la création d'un service d'enquête spécialisé au sein de Bercy, qui pourra être saisi par le parquet national financier (PNF) pour les affaires nécessitant une expertise fiscale pointue. "Aujourd'hui, on bute sur des capacités d'enquête", souligne l'entourage du ministre, qui précise que 260 affaires sont aujourd'hui en attente d'un traitement judiciaire. "Cela permettra à la justice d'avancer", notamment "sur les dossiers complexes". Le texte prévoit également de rendre la publication du nom du fraudeur obligatoire en cas de condamnation pénale, sauf décision expresse du juge, et créée une procédure de plaider coupable pour les fraudeurs poursuivis au pénal et disposés à reconnaître leurs torts.
"Verrou de Bercy". Rien n'est en revanche prévu concernant le fameux "verrou de Bercy" (monopole des poursuites pénales pour le fisc en cas de fraude), la mission parlementaire chargée de réfléchir à ce sujet épineux n'ayant pas encore rendu ses travaux. "Cela ne vaut pas dire qu'on n'en parlera pas au parlement", précise toutefois l'entourage de Gérald Darmanin, ouvert à l'introduction d'amendements sur le sujet. Ces dernières années, plusieurs mesures ont été adoptées pour rendre la traque des fraudeurs plus efficace, à l'image de la loi sur la lutte contre la fraude fiscale, votée dans le sillage de l'affaire Cahuzac. Mais la série d'affaires révélées par la presse, des Panama papers aux Swissleaks, a montré qu'il existait encore des failles. Selon le syndicat Solidaires Finances publiques, la fraude fiscale coûterait entre 60 et 80 milliards d'euros chaque année à la France.