Le leader de la France insoumise Jean-Luc Mélenchon, cité parmi les cibles potentielles d'une cellule de l'ultra-droite démantelée en octobre, a décidé de "suspendre" symboliquement sa participation à l'enquête sur ce groupuscule, dénonçant une "volonté d'obstruction", a annoncé vendredi son avocat dans un communiqué.
"Un signe de défiance inédit" de la part du parquet, selon son avocat. La juge d'instruction antiterroriste chargée de l'enquête avait confirmé en mai la constitution de partie civile de l'ancien candidat à la présidentielle, contre l'avis du parquet de Paris, qui a ensuite saisi la chambre de l'instruction pour contester sa recevabilité.
Son avocat, Juan Branco, y a vu "un signe de défiance inédit". "Il ne sera donc pas répondu à l'appel du parquet, et nul acte supplémentaire ne sera demandé", a-t-il annoncé. Cette abstention ne vaut pas retrait de sa constitution de partie civile qui doit encore être débattue à la chambre de l'instruction. Pour le parquet, l'enquête ouverte pour "association de malfaiteurs terroriste criminelle" ne vise pas "des faits d'atteinte à la vie" de Jean-Luc Mélenchon.
Au cœur de l'enquête, un ancien militant d'Action Française. Des menaces d'attentats visant le leader LFI et Christophe Castaner, porte-parole du gouvernement et ex-maire de Forcalquier, en Alpes-de-Haute-Provence avaient été révélées en octobre, au lendemain d'un coup de filet contre des membres de l'ultra-droite. Tous étaient liés à Logan Alexandre Nisin, un ancien militant du mouvement royaliste Action Française arrêté quelques mois plus tôt. Ce dernier avait fondé un groupuscule baptisé OAS, reprenant le nom de l'organisation responsable d'une campagne sanglante contre l'indépendance de l'Algérie dans les années 1960.
Lors de sa garde à vue fin juin 2017, le jeune homme de 22 ans avait admis que le groupe avait envisagé de cibler Jean-Luc Mélenchon durant la campagne présidentielle et Christophe Castaner, et de s'en prendre à des "kebabs" de Marseille ou au "chantier de la grande mosquée de Vitrolles". Leur entreprise avait tourné court, faute d'en avoir "les capacités", selon l'enquête. Jean-Luc Mélenchon et Christophe Castaner ont affirmé n'avoir jamais été informés de ces menaces depuis cette date.
Mélenchon réclamait l'audition de Gérard Collomb. En avril, l'avocat a écrit à la juge pour réclamer l'audition de Gérard Collomb, ministre de l'Intérieur, et la déclassification de notes la DGSI. Au vu des cibles évoquées, l'avocat contestait dans ce courrier l'arrêt après la présidentielle de la protection accordée par le ministère à Mélenchon alors qu'il était candidat aux législatives à Marseille. Il demandait aussi des explications sur des propos ambigus du ministre en octobre au lendemain du coup de filet : "Croyez-moi qu'il y a des gens de la DGSI qui devaient suivre (Jean-Luc Mélenchon) de manière à le protéger", avait dit le ministre Collomb.
"La tentative par le parquet d'éviter l'audition de Gérard Collomb, contre l'avis des juges (...), démontre une volonté d'obstruction que nul argument juridique ne saurait justifier", a dénoncé Juan Branco.