C'est le premier à se déclarer. Certainement pas le dernier. Jeudi matin, le député Luc Carvounas a officialisé ce qui n'était plus un secret pour personne : sa candidature à la tête du PS. L'élu du Val-de-Marne la défendra dans quatre mois, lors d'un Congrès qui doit permettre de trouver (enfin) un successeur à Jean-Christophe Cambadélis. Et de redresser (enfin) une famille politique qui a bien du mal à se remettre de ses défaites électorales.
Les objectifs de Luc Carvounas sont clairs : "rassembler une équipe de femmes et d'hommes, de visages nouveaux, proposer un projet clair et faire en sorte que le congrès du mois de mars soit le congrès du commencement." Reste à savoir si la candidature du député fera des émules au sein du parti et chez les militants.
Gravir les échelons dans le Val-de-Marne. Le parcours du député ressemble à celui de dizaines d'autres figures du PS. Il est entré dans les arcanes du parti en 1996, à 25 ans, après avoir participé à la campagne de Lionel Jospin l'année précédente. Si cette élection se solde par un échec, elle permet tout de même au jeune diplômé d'histoire de rencontrer René Rouquet, maire d'Alfortville, qui le prend sous son aile dans le Val-de-Marne. De premier secrétaire de la section de la commune, Luc Carvounas passe premier secrétaire de la fédération du Val-de-Marne en 2008. Le lieu et l'année où il est élu pour la première fois, comme conseiller général. Une fonction qu'il abandonne lorsqu'en 2011, il est élu sénateur.
"Perle rare". Le patronage de René Rouquet va jusqu'à ouvrir les portes de la mairie d'Alfortville à Luc Carvounas, élu à la succession de son mentor dès 2012. Le député-maire sortant, qui choisit de ne pas aller jusqu'au bout de son mandat, ne tarit pas d'éloges sur son poulain, cette "perle rare", ce "militant exemplaire, élu compétent et travailleur". Les électeurs semblent du même avis, et votent pour sa réélection en 2014. En juin dernier, Luc Carvounas rajoute une ligne supplémentaire à celle de ses mandats, en faisant son entrée à l'Assemblée nationale.
Ancien "dézingueur" proche de Valls. Dans les travées de l'hémicycle, le député francilien croise forcément Manuel Valls, dont il a été très proche il y a six ans –une éternité, au vu de l'ampleur de la recomposition politique intervenue depuis. En 2011, en effet, le premier était le directeur de campagne du second pour la primaire. Il se revendiquait alors d'une "gauche décomplexée", revendication souvent validée par ceux qui l'ont côtoyé lorsqu'il est chargé, à partir de 2012, de négocier avec les autres partis. "Il dialogue avec un fusil", dit de lui un responsable du Parti communiste dans Le Monde, tandis qu'Eric Coquerel, alors au Parti de gauche, fustige un "anticommuniste primaire" qui "joue les dézingueurs". Jean-Luc Mélenchon s'agace aussi contre un "petit nervi qui vient aboyer".
" On a essayé de lui coller telle ou telle étiquette, mais il est d'abord socialiste. "
Opposant pur et dur. Cette époque est révolue. Jusqu'au deuxième tour de la primaire socialiste de 2017, Luc Carvounas s'est affiché aux côtés de Manuel Valls. Mais le refus de ce dernier de soutenir Benoît Hamon, puis son choix de rejoindre la majorité présidentielle pour les législatives, ont enterré toute collaboration politique. Et aujourd'hui, le député du Val-de-Marne se forge une toute autre image. Celle d'un opposant pur et dur à la politique gouvernementale, contre laquelle il tempête à intervalles réguliers dans l'hémicycle.
"Il est d'abord socialiste". Sans surprise, cette transhumance lui est déjà reprochée. Lui a décidé d'en faire une force. "Le rassemblement de la gauche, c'est mon ADN, je n'ai jamais dérogé à ça. C'est mon socle, n'en déplaise aux esprits chagrins qui disent que je n'ai pas de colonne vertébrale", explique-t-il à 20 Minutes. "On a essayé de lui coller telle ou telle étiquette, mais il est d'abord socialiste. Aujourd'hui, il a une position centrale", vante également Christophe Lantoine, l'un de ses proches passé par le cabinet d'Arnaud Montebourg à Bercy.
Une "campagne positive" déjà pleine de tacles. La position centrale, la capacité à rassembler : les arguments sont taillés pour une candidature à la tête du PS. Luc Carvounas a également pour lui de s'être lancé, alors que d'autres quadragénaires sont restés bien plus en retrait. Que ce soit parce qu'il n'y a que des coups à prendre, ou parce qu'ils estiment que le plus important est le travail de fond, pas une campagne pour un congrès qui annonce son lot de querelles et de coups bas. Le député du Val-de-Marne assure qu'il veut faire "une campagne positive". Pourtant, le voilà qui retrouve déjà son costume de "dézingueur". Fin novembre, dans Libération, il a pris position pour que le futur premier secrétaire du PS ne soit pas rémunéré et possède "un mandat, de préférence à l'Assemblée nationale". Un tacle à Najat Vallaud-Belkacem, battue aux législatives et qui souhaiterait mettre fin au statut bénévole du leader du parti.
L'ancienne ministre de l'Éducation nationale figure en effet sur la liste des autres candidats potentiels, avec son ancien collègue à l'Agriculture, Stéphane Le Foll. Julien Dray, ancien conseiller de François Hollande et Rachid Temal, actuel numéro un du PS, songeraient également à se porter candidats.