C'est une étude de la Nasa qui le dit : la sieste augmente la productivité au travail de 35%. Et en France, pas moins de 20% des salariés reconnaissent s'assoupir régulièrement au travail. Faut-il donc généraliser le petit roupillon en entreprise ? C'est ce que préconise lundi un rapport du think tank Terra Nova. L'organisme proche du PS incite les entreprises à "favoriser la discussion au sein de l’entreprise sur l’organisation de temps de récupération pendant la journée de travail". "Il peut s’agir, par exemple, de la création d’une salle de repos ou de sieste, dédiée à la micro-sieste (entre 15 et 20 minutes)".
>> Mais les entreprises françaises, qui sont libres de décider en la matière, sont-elles vraiment prêtes ? Aujourd'hui, l'idée fait son chemin même si la question semble encore taboue.
Quelques initiatives en France… Lorsqu'on lui demande s'il existe une entreprise "siesto-compatible", Daniel Léger, co-auteur du rapport de Terra Nova, invite d'emblée à regarder du côté de Renault. La marque au losange teste depuis un an une salle de sieste dernier-cri pour son site du Plessis-Robinson, dans les Hauts-de-Seine, une annexe du siège social. Les 1.200 salariés du site peuvent accéder à sept cabines, avec un lit chacune et la possibilité de choisir la luminosité. Certes, la durée de la sieste est chronométrée : pas plus de 20 minutes par passage en cabine. Mais selon les chiffres communiqués par l'entreprise, cela semble séduire de plus en plus : en un an, la fréquentation est passée de 40 personnes par jour en moyenne à 60, avec un pic entre 11h et 15h, et ce sans que l'entreprise ait besoin de communiquer dessus.
"Les retours sont très positifs. Les salariés évoquent une déconnexion suffisante pour récupérer, et aucun conflit avec la hiérarchie. D'ailleurs, les managers aussi sont satisfaits et fréquentent la salle", raconte à Europe 1 le Dr Guillemette Latscha, médecin coordinateur du groupe. Concluant, le test va aboutir à l'ouverture d'une deuxième salle au Plessis-Robinson, et pourquoi pas à une extension au reste du groupe.
… Peu importe la taille de l'entreprise… Renault n'est pas la seule grande entreprise à proposer ce type de service. Le siège de Danone France met lui aussi à disposition une salle de sieste. D'autres entreprises, plus modestes, s'y sont mises également. Léa Nature, PME de 450 salariés qui fabrique des produits "Bio", à La Rochelle, s'est dotée d'une salle "zen", avec quatre transats, des matelas, lumière tamisée et musique douce. "Ce repos est compté dans le temps de pause. On ne paie pas nos salariés à faire la sieste!", explique Mireille Lizot, responsable du service de communication, interrogée par le site changerletravail.fr. Mais selon elle, "les employés sont plus efficaces" après une petite sieste.
" Cela permet de faire un vrai break, de penser à autre chose "
Même son de cloche du côté des cabinets d'audit Davidson Consulting et Pricewaterhouse, ou encore de Novius, une start-up lyonnaise de création de sites web, qui offre à ses salariés une salle avec "trois gros poufs" pour la sieste. "Cela permet de faire un vrai break, de penser à autre chose voire de dormir, et de revenir reposer pour attaquer l'après-midi", témoigne Mathias Duret, consultant en stratégie digitale, contacté par Ouest France. "Le PDG lui-même est adepte de la sieste. Il porte un regard positif sur cette salle et il sait ses bénéfices", poursuit le salarié.
… Mais le sujet reste tabou. Pourtant, en France, les initiatives semblent limitées. Selon une étude de 2014 du cabinet Robert Half, seuls 47% des dirigeants d'entreprises françaises jugent "envisageable" l'instauration d'une sieste de 20 minutes par jour pour les salariés. Et 36% qualifient l'idée de "farfelue". Signe que la mode n'a pas encore vraiment pris : la société Sixta, qui proposait des services d'audit pour l'installation de salle de sieste, a dû suspendre son activité, rapporte le site changerletravail.fr. "En France, quand on veut offrir du bien-être aux salariés, on rajoute une machine à café et on augmente le budget du Comité d’entreprise. Les choses avancent, mais on a encore du pain sur la planche", explique également Antoine Mallet, gérant de ColorInside, société orléanaise qui aménage, entre autres, des salles de sieste en entreprise, citée par Le Monde.
Contactée par Europe 1, la direction d'Orange, qui a pourtant installé des salles de sieste sur certains sites, refuse d'ailleurs catégoriquement de communiquer sur le sujet. "J’ai dû me montrer très convaincante pour instaurer un espace calme" en Isère, racontait en juillet dernier Monique Fraysse-Guiglini, médecin de travail chez Orange, citée par Le Monde. Conclusion : on reste encore loin de la mentalité asiatique. En Chine, le droit à la sieste est inscrit dans la Constitution. Au Japon, la pratique est courante, et certaines entreprises imposent même la sieste à leurs salariés.