C’est une vision irénique que défend l’Elysée. Tout va mal : Trump et la question migratoire font turbuler le système, des coalitions baroques se mettent en place partout en Europe, en Italie ce sont deux ministres qui dictent leurs volontés au Premier ministre, en Allemagne, un ministre de l’Intérieur lance un ultimatum à la chancelière, eh bien c’est le moment "de faire du judo" avec les populistes, explique un conseiller.
Agir plus vite. Il s'agit de mettre à l’épreuve la sentence de Clémenceau : "mon centre cède, ma droite recule, la situation est excellente, j’attaque !" "J’attaque", c’est le maître mot à l’Elysée. On attaque les discours des populistes, on démonte leurs coups montés, indéniablement la mise en scène de l’Aquarius en est un, dit-on, et on accélère la mise en œuvre de tout ce qui a été engagé pour que "ça délivre plus vite", explique-t-on, c'’est-à-dire pour que l’opinion publique comprenne qu’on agit, et qu’on agit mieux ensemble que seul. Plus d’aide et de coopération avec les pays d’émigration, Frontex plus vite et plus fort pour renforcer la protection aux frontières, plus d’efficacité enfin dans l’accueil fait aux réfugiés, aux vrais, et enfin plus de célérité dans les reconduites pour les autres.
Trouver un agenda commun. Sauf que la crise politique que doit affronter Angela Merkel fragilise aussi le président français. L’Elysée reconnaît que se joue là une course contre la montre, mais en gros, il n’y a plus le choix, ce sont eux, entendez les populistes, les isolationnistes, les mêmes qui sont à l’œuvre avec Donald Trump aux Etats-Unis, ou nous, pour faire vivre l’idée européenne. Si aucun agenda commun n’est trouvé sur la question migratoire comme sur la zone euro, d’abord mardi au cours du long tête-à-tête entre la chancelière et le président français, et à la fin du mois lors du sommet européen, c’est la dislocation assurée. Alors comment aider Angela Merkel à surmonter sa crise politique ? En trouvant un "accord substantiel", nous dit-on, mais encore ? À Paris, on est surtout convaincu que c’est à elle de faire le saut, le saut vers un accroissement de l’Europe. Elle aurait fait le premier pas en acceptant de discuter d’une réforme de la zone euro, même a minima.
Les élections de 2019. Alors cécité française ou force de conviction ? Emmanuel Macron veut croire que c’est bien l’antagonisme qu’il avait modélisé pendant sa campagne, d’un avenir qui se joue entre partisans de l’ouverture et défenseurs de la fermeture, qui trouve ces jours-ci son heure de vérité. Rien n’était prévu, mais tout était écrit. La situation exige juste d’aller encore plus vite. Parce que dans un an, dans chacun des pays de l’Union, les élections européennes donneront l’avantage aux uns ou aux autres.