Les réactions émues se sont multipliées en France après le décès lundi de l'abbé Pierre, ardent défenseur des sans-abri et fondateur du mouvement Emmaüs. Il était âgé de 94 ans. Ses funérailles, vendredi prochain à Notre-Dame-de-Paris en présence du président Jacques Chirac, seront l'occasion d'un hommage national. De son vrai nom Henri Grouès, celui qui fut longtemps la personnalité préférée des Français, jusqu'à ce qu'il demande à ne plus figurer dans les enquêtes de popularité, est mort à 5h25 à l'hôpital parisien du Val-de-Grâce, où il avait été admis le 14 janvier pour une bronchite. Une porte-parole d'Emmaüs France, créé par l'abbé Pierre en 1949, a précisé que cette bronchite avait dégénéré en une infection pulmonaire qui aurait entraîné son décès. Jacques Chirac s'est dit "bouleversé". "Avec la disparition de l'abbé Pierre, c'est la France entière qui est touchée au coeur. Elle perd une immense figure, une conscience, une incarnation de la bonté", a-t-il déclaré dans un communiqué. Le Premier ministre, Dominique de Villepin, a salué "une force d'indignation capable de faire bouger les coeurs et les consciences". Jean-Louis Borloo, ministre de l'Emploi, de la Cohésion sociale et du Logement, a estimé que la loi instaurant un droit opposable au logement, examinée le 30 janvier au Sénat, était "la loi de l'abbé Pierre" et qu'elle devait porter son nom. "Le meilleur hommage qu'on pourra rendre à l'abbé Pierre, c'est de continuer", a déclaré le président d'Emmaüs France, Martin Hirsch. L'association des Enfants de Don Quichotte, qui a contraint le gouvernement à prendre des mesures d'urgence pour les mal-logés en établissant des campements à Paris et en province, a jugé qu'"il y a urgence à donner raison à l'abbé Pierre". Les Enfants de Don Quichotte ont demandé l'application immédiate des promesses faites le 8 janvier par le gouvernement, dont l'ouverture de 27.000 places d'hébergement. Pour l'ancien ministre socialiste et fondateur de Médecins sans frontières Bernard Kouchner, le prêtre à la barbe blanche et à l'éternelle soutane avait "inventé la loi du tapage" pour faire avancer la cause des déshérités. Le cercueil de l'abbé Pierre sera exposé à partir de mercredi dans la chapelle de l'hôpital du Val de Grâce. Après les funérailles à Notre-Dame-de-Paris, le fondateur du Mouvement Emmaüs sera inhumé dans la plus stricte intimité à Esteville, en Seine Maritime, où le mouvement Emmaüs possède une "halte".