En Diola, une langue nigéro-congolaise, son prénom signifie "qui a gagné beaucoup de combats", comme l'indique un portrait réalisé par Jeune Afrique. À presque 40 ans, Sibeth Ndiaye en a déjà remporté quelques uns. Engagée en politique depuis plus de quinze ans, la discrète et proche conseillère presse d'Emmanuel Macron a été nommée secrétaire d'État porte-parole du gouvernement, dimanche soir. Elle succède à ce poste à Benjamin Griveaux, qui vise l'investiture LREM pour les élections municipales à Paris.
"Très proche" du chef de l'État. Le grand public a découvert Sibeth Ndiaye dans le documentaire Les coulisses d'une victoire, diffusé sur TF1 après l'élection présidentielle de 2017. Interruption d'interviews jugées trop longues, gestion des journalistes - parfois traités de "sagouins" - et coups de gueule lorsqu'elle jugeait les propos de son "poulain" déformés : la charismatique conseillère presse du candidat apparaît alors comme l'un des personnages incontournables de l'équipe. Interrogée par Jeune Afrique, la journaliste Laurence Haïm, également engagée dans la campagne du futur président, la décrit d'ailleurs à l'époque comme "très proche" d'Emmanuel Macron.
Mais l'implication politique de Sibeth Ndiaye est née bien avant l'émergence d'En marche! et la campagne de 2017. Diplômée d'un DESS en économie de la santé, la jeune femme a fait ses armes à l'Unef, avant d'entrer au PS en 2002, révoltée, de son propre aveu, par l'accession de Jean-Marie Le Pen au second tour de l'élection présidentielle. Au sein du parti, elle occupe le poste de secrétaire nationale chargée de la petite enfance, puis travaille avec Claude Bartolone et au sein du cabinet ministériel d'Arnaud Montebourg.
Un SMS polémique à l'été 2017. C'est là qu'elle fait la connaissance d'Emmanuel Macron. "Je l'ai rencontré pour la première fois à l'Elysée", confie-t-elle dans une interview, toujours à Jeune Afrique. "Il était secrétaire général adjoint (...) Il était d'un abord agréable, avec beaucoup d'humour." Outre la politique, tous deux ont en commun une passion pour la littérature. "Je me rappelle toujours avec émotion qu'au décès de ma mère, il avait eu la délicatesse de m'offrir un livre de Roland Barthes, Journal de deuil", a raconté la conseillère, citée par Marie-Claire. "Il m'a servi de livre de chevet pendant de longs mois".
Le nom de Sibeth Ndiaye est aussi associé à une polémique, déclenchée en août 2017 après la parution d'un article du Canard Enchaîné. Selon l'hebdomadaire satirique, la conseillère aurait répondu "yes, la meuf est dead" par SMS à une journaliste, qui lui demandait confirmation du décès de Simone Veil. Une accusation réfutée par la principale intéressée, qui a évoqué auprès de LCI un message "totalement faux".
Ledit message a toutefois refait surface dimanche soir, dès l'annonce de sa nomination. "Donc, celle qui avait dit 'la meuf est dead' en parlant de Simone Veil est nommée porte-parole du gouvernement. Tout va bien en Macronie", a ainsi tweeté la porte parole des Républicains Lydia Guirous.
Donc celle qui avait dit "la meuf est dead" en parlant de Simone Veil est nommée Porte-parole du gouvernement. Tout va bien en Macronie. #remaniementhttps://t.co/3YJ31Y6LKO
— Lydia Guirous (@LydiaGuirous) 31 mars 2019
Naturalisée française en 2016. Cet épisode mis à part, la conseillère presse, était jusqu'ici très active en coulisses, partisane d'une communication de combat, s'attirant parfois les foudres de l'une partie de l'entourage du chef de l'Etat, dont les proches de Brigitte Macron. C'est aussi elle qui avait publié la vidéo sur le "pognon de dingue" que, selon Emmanuel Macron coûtaient les aides sociales.
"Mon futur rôle auprès d'Emmanuel Macron, c'est à lui de vous dire, pas à moi", répondait-elle en 2017 lorsque Jeune Afrique l'interrogeait sur ses ambitions politiques. Née au Sénégal, naturalisée française en 2016, la mère de famille refusait auprès du journal de se voir comme un "modèle". "Si j'avais un seul souhait, c'est que mon parcours démontre à tous ceux qui sont susceptibles d'embaucher ou de mettre le pied à l'étrier d'un jeune homme ou d'une jeune femme, que ce qui compte c'est d'abord la personnalité et l'envie de le faire", glissait-elle à l'époque.
Sa nomination intervient en outre après le départ de la plupart des "Mormons", du nom de ce groupe de quadras et trentenaires qui ont accompagné Emmanuel Macron dans sa quête de l'Elysée, à l'instar de Benjamin Griveaux et des conseillers Ismaël Emelien et Sylvain Fort. Tandis que ces deux derniers ont quitté l'exécutif, Sibeth Ndiaye y gravit un nouvel échelon, prenant une dimension publique inédite dans sa carrière.