"Un choc d'offre" pour "déverrouiller" le secteur du logement en pleine crise. C'est la promesse du Premier ministre, Gabriel Attal, lors de son discours de politique générale. Le chef du gouvernement a annoncé plusieurs mesures. Pour Europe1.fr, Loïc Cantin, président de la Fédération nationale de l'immobilier (FNAIM) réagit à ses annonces. Interview.
Lorsque Gabriel Attal annonce un "choc d'offre" pour "déverrouiller" le secteur du logement, que faut-il comprendre ?
On a du mal à comprendre ce qu'a voulu dire le Premier ministre. Un "choc d'offre" laisserait penser qu'il n'y a pas de chantiers en cours, or ce n'est pas le cas, toute la filière est disposée à construire mais avec quel dispositif d'accompagnement et pour qui ? Aujourd'hui, c'est un choc de demande qu'il aurait fallu annoncer : accompagner les ménages, les primo-accédants dans l'accession à la propriété. La France souffre d'un marché et d'une économie immobilière à l'arrêt, la demande est en panne.
Pour soutenir le secteur du logement social, Gabriel Attal souhaite créer un prêt de très long terme de 2 milliards d'euros.
Ce n'est pas un prêt créera des logements, il n'est qu'un élément du financement. Ce n'est pas un critère de réussite pour une politique sociale du logement. Comment peut-on comprendre que l'État puisse être à la hauteur de la mission qui lui incombe alors qu'il estime les besoins à 250.000 logements contre 512.000 pour le mouvement HLM ? Il faut déjà se mettre d'accord sur une feuille de route, on est dans l'ignorance la plus totale et le refus de voir ce qu'il se passe réellement. L'État ne veut pas comprendre, l'État ne veut pas accepter d'être face à une situation qu'il ne peut pas gérer.
La réquisition de bâtiments vides, notamment de bureaux, pour créer 30.000 nouveaux logements d'ici à trois ans, est-ce une bonne solution ?
Un État qui n'arrive même pas à réquisitionner des bâtiments administratifs vides depuis plusieurs années au moins pour répondre à l'urgence de SDF qui meurent encore dans la rue en 2024, comment le ferait-il pour réquisitionner des immeubles de bureaux pour faire des habitations alors qu'ils ne sont pas conformes à cette destination ? C'est encore une idée qui est lancée, c'est un saupoudrage de slogans qui n'a rien à voir avec la réalité.
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Aider les classes moyennes à accéder aux logements intermédiaires, qu'en penser ? Devenir propriétaire n'est-il pas plus important que rester locataire ?
L'ambition d'un grand pays est de permettre à chacun d'avoir un toit au-dessus de sa tête au moment de sa retraite. Le social ne devrait être qu'un relais dans le parcours résidentiel d'une vie et ce n'est pas le chemin qu'on prend. Le logement social est un tremplin, mais pas une finalité. Tout le monde aspire à devenir propriétaire, mais ce n'est pas la vision politique de ce gouvernement qui ferait bien de se rapprocher des Français.
Autre mesure annoncée par Gabriel Attal, la simplification massive des normes : revoir les DPE, simplifier l'accès à MaPrimeRénov'... Qu'en penser ?
C'est toujours le même refrain ! Elisabeth Borne avait dit la même chose... Aujourd'hui, ce n'est pas le DPE le problème, c'est le temps d'attente. Par exemple, un audit énergétique en ce moment, c'est deux ans pour l'avoir ! Leur vision est extrêmement technocratique, comme lorsque Gabriel Attal dit qu'il faut déverrouiller l'accès à la profession de syndic de copropriété : quelle vision déconnectée de la réalité des métiers.
Je propose à Gabriel Attal de venir faire un tour dans les copropriétés et les assemblées générales, il va comprendre ce que c'est la vie de syndic à qui on demande toujours plus. Il a une vision réductrice du métier. On est en plein dans le macronisme de l'excès.
Enfin, pour répondre à la crise du logement qui est un enjeu majeur, Gabriel Attal ne devrait-il pas nommer un ministre de plein exercice ?
Il faudrait un vrai ministre du Logement et de l'aménagement du territoire avec une vision réelle de la situation en France. À la FNAIM, nous avons les solutions, nous avons les remèdes mais le gouvernement ne nous écoute pas, il ne répond même pas à nos sollicitations. Un ministre de plein exercice serait extrêmement bénéfique. Si nous avons encore un ministre délégué, je crains fort que nous continuions à s'enfoncer dans une crise que n'aura pas vu le gouvernement et dont il portera l'entière responsabilité.